Home > Partenariats > Marche de l’amitié de Le Gua : le témoignage qui a ému les marcheurs

Pour la 9ème marche de l’amitié qui s’est tenue à Le Gua en Charente-Maritime, dimanche 1er avril, l’association des Papillons de Charcot, la gymnastique Volontaire de Le Gua, ainsi que l’association Courir pour les Autres 17, se sont joints à Françoise Gauvrit pour soutenir les malades en marchant au profit de la recherche contre la Sclérose Latérale Amyotrophique. 110 marcheurs et une trentaine de personnes ont répondu « présents » au pot de l’amitié offert par le magasin de grande distribution du village. Mais une personne en particulier a livré un témoignage qui a ému toute l’assemblée. Aujourd’hui nous vous faisons part du témoignage d’amour de Peggy pour sa maman, mais aussi d’espoir pour tous les malades et leurs proches.

« La SLA ou comment accepter l’inacceptable ?


J’ai beaucoup réfléchi pour savoir ce que j’allais vous dire aujourd’hui et j’avais dans un premier temps préparé mon discours de manière négative, en ne gardant que les mauvais côtés de la maladie, et je sais combien il y en a… Et puis en relisant ce texte encore et encore, je me suis dit que je n’étais pas là pour vous faire perdre espoir, mais au contraire, je souhaiterais que mon discours vous aide à continuer de vivre, autrement certes, mais vivre tout de même.

Je vais vous parler de ma maman, 59 ans, qui a été officiellement diagnostiquée en novembre 2011, mais la maladie avait déjà commencé sa lente destruction… Si le suivi médical avait été sérieux, nous aurions sûrement pu entamer le seul traitement possible à ce jour, le Rilutek, et ainsi ralentir ou stabiliser la progression. Malheureusement, lorsque ce médicament est pris trop tard, il ne sert pratiquement à rien, preuve en est chaque jour qui passe…

Quand le verdict tombe, tout s’écroule autour de soi et il faut du temps pour comprendre et peut-être un jour accepter. On se dit encore aujourd’hui « pourquoi ? » « pourquoi cette maladie ? » « Maman est trop jeune » ou encore « personne ne mérite de vivre un tel calvaire »…
J’ai lu et vu tellement de choses au sujet de la SLA que désormais, je préfère vivre au jour le jour et ainsi profiter pleinement de tous les moments qu’il nous reste à partager. Au départ, complètement abattus, désemparés, nous décidons ensuite mes proches et moi de vivre au mieux avec la maladie, nous n’avons guère le choix.
Ceci nous permet de partager de bons moments. La maladie ne laisse plus beaucoup de place aux plaisirs simples de la vie, mais chaque instant est vécu pleinement et on se surprend à rire ensemble de choses devant lesquelles ne serions restés impassibles autrefois.

Pourtant, nous avons l’impression que la maladie de maman fait désormais partie de la famille. Elle nous suit partout et nous rappelle sans cesse à l’ordre : les mots ne sortent presque plus de sa bouche et lentement, elle perd l’usage de la parole, pour n’émettre aujourd’hui que des sons, souvent inaudibles… La communication se résume alors à un simple tableau où elle peut encore y écrire et qu’elle doit avoir partout avec elle. Quand elle essaie de me parler et que je ne comprends pas ce qu’elle veut me dire, je fais semblant d’avoir compris n’importe quoi, je tourne la situation à la plaisanterie et ça la fait sourire. J’ai réussi quelques minutes à lui faire penser à autre chose.

Tous les petits plaisirs de la vie lui sont désormais quasi impossibles : plus de longues marches au bord de mer comme elle aimait tant, elle a trop mal au dos et se fatigue vite. Mais nous sortons quand même, quelques instants, histoire de s’évader et oublier juste un peu… et là encore, elle retrouve le sourire et ça nous fait du bien. Il n’y a parfois pas de mots entre nous, mais nous savons à cet instant combien vivre ces moments précieux est important et nous essayons autant que possible de les renouveler.

Elle ne peut presque plus rien avaler, et sa survie dépend de cette sonde à l’estomac, par laquelle elle est nourrie 6h/jour… Nous sommes conscients que les repas en famille ne seront plus jamais comme avant.
Parfois, elle s’assoit près de nous, regarde fixement notre assiette, et je comprends dans ses yeux qu’elle souffre de ne plus pouvoir s’alimenter comme nous. La culpabilité est alors tellement grande pour nous ses proches ; nous n’osons plus manger devant elle… Et dans un énorme effort pour sortir quelques sons, elle nous dit « j’aimerais tant manger comme vous » et elle fond en larmes, quitte la table et le silence s’installe, les larmes nous montent aux yeux, la maladie continue de nous pourrir la vie… Nous essayons alors de lui mixer un peu de notre repas, elle peut ainsi profiter de de toutes ces saveurs qu’elle oublie peu à peu.

Ses forces l’abandonnent de jour en jour et chaque geste de la vie quotidienne devient de plus en plus difficile. Maman a mal dans son corps, dans sa tête et c’est difficile pour elle de nous entendre lui dire qu’il faut qu‘elle se batte, sachant qu’il n’y a aucun espoir de guérison à ce jour… Elle baisse les bras, résignée, et chaque jour qui passe laisse du terrain à cette satanée maladie.
C’est là que notre combat à tous commence ; nous essayons autant que possible de ne pas la traiter comme une malade. Cela vous rappellera sans doute un film français, sorti il y a peu, qui nous vente l’histoire d’une personne handicapée et d’un jeune de banlieue. Plus on regardera maman comme une personne diminuée, atteinte une grave maladie, moins elle aura envie de se battre. Nous essayons de la laisser autonome le plus possible et n’intervenons que lorsque nous constatons qu’il est impossible pour elle de faire ce qui lui est demandé. Nous ne la forçons en rien et nous essayons de vivre « normalement », avec toutes les contraintes que la maladie nous impose.

Je lui dit souvent que je l’aime, que nous sommes là pour elle, que l’on se bat à ses côtés et qu’elle ne doit pas abandonner. Je lui dit aussi que la vie est belle malgré tout, qu’il faut qu’elle profite de chaque instant ; et moi je les vis comme si c’était les derniers, avec la crainte quand je la quitte que c’est peut-être la dernière fois que je la serre dans mes bras…

Je ne sais pas où l’on trouve la force de se battre, l’amour qu’on lui porte nous y aide, mais parfois, on voudrait tout abandonner, tellement nous sommes fatigués. On se dit aussi que c’est un cauchemar, qu’on va bientôt se réveiller et que ce n’est peut-être pas cette maladie. Mais le réveil est difficile… nous avons bien à faire à la SLA, tous les symptômes sont présents et la souffrance de maman nous le rappelle chaque minute qui passe.

Aujourd’hui, ce qui me révolte, c’est qu’on est capable de dépenser des milliers d’euros pour chauffer un stade pour que la pelouse reste intacte mais on ne fait rien ou si peu pour tous ces malades. Le gouvernement dépense une fortune dans la sécurité routière pour faire baisser le nombre de victimes de la route. Mais que fait-il pour les personnes atteintes par ce genres de maladies ? Pas grand chose… tout est affaire de rentabilité sans doute…

Le message que je souhaitais faire passer aujourd’hui est le suivant : restez autant que possible positifs, entourez votre proche d’amour et vivez avec lui tout ce qui est possible de vivre quand on est atteint de cette maladie. Puisque nous savons tous que l’issue est fatale, profitons-en pour se dire à quel point on s’aime et faisons en sorte de n’avoir aucun regret. Chaque instant vécu est un de plus dans notre mémoire. Le soutien de la famille, des amis, est indispensable.
Je tiens d’ailleurs à remercier toux ceux qui sont présents à mes côtés, famille ou proches, ainsi que les membres de l’association Les Papillons de Charcot, qui ont toujours une oreille pour m’écouter quand je ne vais pas bien. Merci à tous !

La SLA ou comment accepter l’inacceptable… »

 

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